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                                   ALAIN PEDRONO (1951-1999)   

         Dès la fin de ses études plastiques Alain Pédrono affirmait sans ambiguïté son goût d’une peinture figurative, ce qui lui valut en ces années 70 un premier échec devant un aréopage mal choisi qui ne jurait encore que par l’abstraction. Une seconde présentation lui permit de suivre son chemin comme il l’entendait, c'est-à-dire à l’écart des modes tyranniques, loin des sentiers obligés. Car ce jeune homme qui commença véritablement sa trop courte carrière de peintre en 1974, refusera toujours de s’inscrire sous la bannière d’un quelconque courant artistique. Ce qui ne l’empêchait nullement d’admirer les primitifs flamands, qu’il visitait régulièrement au Louvre, Delacroix dont il lisait le Journal avec passion, Magritte aussi bien que Tanguy, ou des contemporains comme Fromanger, Adami et Monory.

   Timide, discret, voire secret, Pédrono était avare de déclarations théoriques, allant jusqu’à avouer, si l’on en croit Francis Parent : « Je n’ai pas envie que l’on rentre dans mes toiles ». Son processus de création est extrêmement complexe et lent (gomme, multiples glacis, peigne, couteau, pinceau…). Il était rarement satisfait de lui-même : un tableau ne lui paraissait jamais achevé. On songe à Frenhofer, le héros du Chef d’œuvre inconnu de Balzac et à ses « couches de couleurs que le vieux peintre avait successivement superposées en croyant perfectionner sa peinture ». On demeure surpris qu’il ait réussi cependant à produire autant d’œuvres, toutes d’assez grand format, au cours d’une si brève existence.

    On peut affirmer sommairement que pendant une dizaine d’années (1974-1984) Alain Pédrono se chercha. Il atteint sa maturité et obtient un vrai succès entre 1985 et 1990 (New York, Bruxelles, Londres, Paris) au point qu’alors il vit exclusivement de sa peinture. Mais, victime de la crise du marché de l’art à partir de 1990 et peu soucieux de démarcher galeries et marchands, il doit reprendre une activité salariée et ralentit sa production tout en continuant d’exposer régulièrement jusqu’à sa mort soudaine, en 1999, à l’âge de 48 ans.

    Dès ses débuts Pédrono s’interroge sur le statut qu’il doit accorder à la réalité dans la peinture et sur le sens de la peinture de la réalité. Tout se passe comme s’il avait été obsédé par la célèbre pensée de Pascal : « Quelle vanité que la peinture, qui attire l’admiration par la ressemblance des choses dont on n’admire point les originaux. 

        Pendant plusieurs années donc il va jouer sur la mise en page qui déforme le sujet peint, sur le trompe l’œil qui se dénonce lui-même comme tel, recourir à des matériaux étrangers qu’il introduit dans la toile (éléments de sculpture, tissus, pièces de vêtements, etc.), cultiver l’association insolite d’objets  hétérogènes, à la manière de la « rencontre fortuite » évoquée par Lautréamont. Un tableau intitulé Sur les pavés, la chaise (1983) représentant une chaise longue coupée par un paysage naturel sur une rue, réplique du fameux slogan Sous les pavés, la  plage signifie clairement et avec humour la volonté de subvertir le quotidien dans ce qu’il a de plus matériel.

    Et comme si cette contestation de la réalité ne suffisait pas encore, il va de plus en plus systématiquement utiliser la photographie comme fond stable, nécessaire, à partir duquel on peut bâtir autre chose. Il a maintenant trouvé son expression définitive. Je n’hésite pas à définir son discours, en jouant sur le titre de Breton, comme un discours sur le trop de réalité.

    Alors vont se déployer ces toiles qui donnent à voir des paysages urbains, façades d’immeubles avec escaliers extérieurs de secours comme il en existe tant à New York, enseignes d’hôtels, fenêtres, persiennes ouvertes ou closes, cafés avec terrasses, rues peuplées de grosses automobiles, places et monuments, voire gares ou métro aérien. Mais ces sujets récurrents sont toujours présents, paradoxalement, à la façon de décors. Décors d’un spectacle dont seul le peintre - machiniste possède la clé. Un tableau de 1984 intitulé Ne passez pas sous l’échelle représente un peintre en bâtiment sur une échelle, peignant la façade, dont le pot de peinture jaune se renverse… Autoportrait en abyme ! Car ces décors sont toujours vus comme derrière un rideau transparent : les tableaux sont tous zébrés de lignes verticales ou obliques reliant le bas et le haut (rarement le ciel, invisible). Décors le plus souvent sans personnages ou alors parcourus par des cortèges de choristes d’opéra, des processions d’êtres mal définis, de fantômes. Nous sommes ici, semble-t-il, pour reprendre une belle expression d’Eluard et Max Ernst « à l’intérieur de la vue ». Inutile en effet de vouloir entrer plus avant !

    D’autant plus que l’artiste ne se prive pas de commettre des attentats éperdus sur ces toiles de fond dont la représentation hyperréaliste semble défier toute intervention poétique. Pédrono projette sur la toile des taches de couleurs violentes, enflammant cabines téléphoniques, chaises de café, fontaines wallace, automobiles et autres éléments du mobilier urbain ou niant rageusement, par quelques épaisses hachures noires ou blanches, le rythme banal et programmé d’une journée ordinaire. Le désir pur est alors à l’œuvre. La peinture gestuelle, l’abstraction lyrique perturbant soudain le propos hyperréaliste, telle est l’originalité profonde de Pédrono.

    Un autoportrait émouvant - et à certains égards prémonitoire - de 1979 me semble illustrer l’itinéraire et le destin de cet artiste. Une paire de lunettes brisée, parfaitement réaliste, gît à même le sol, les verres sortis de leur cerclage, tandis que plus haut à gauche, à l’emplacement de l’œil du peintre, invisible, une grosse tache de sang étoilée rouge vif s’égoutte lentement sur la monture.

                                                                              Claude Courtot

                                      Paris, mai 2011

Article de Claude Courtot

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